28/06/2022
L'art disbruptif de Margrit Wirth (6)
V Rien d'autre que l'amour
Aimer les femmes, aimer les hommes. Aimer. Un verbe si pauvre dans la langue française. un verbe qui dit tout mais ne dit rien en même temps. "J'aime ce plat" "J'aime ce film" "J'aime mon chien" "J'aime ce tableau" "J'aime ce paysage" "J'aime cette sportive" "J'aime cet artiste" "j'aime mon enfant" "J'aime ma compagne" "J'aime ma maîtresse" "J'aime ma mère". On dit des dizaines de milliers de fois "J'aime" ou "je n'aime pas" dans notre existence d'être humain.
Mais ça veut dire quoi "aimer" de toutes ses forces malgré les misères et les malheurs que nous subissons, les défaites humiliantes, les échecs cuisants, les traumatismes, les refus, les rejets, les exclusions sociales et matérielles, la solitude persistante, l'incompréhension et la fuite des autres devant votre être?
"Aimer". Dans ces tableaux somptueux, Margrit Wirth nous parle sans cesse d'amour malgré les séparations et les drames intimes qu'elle a certainement vécu.
Il faut juste regarder et s'imprégner de cet art naïf si émouvant de la rencontre et de la beauté amoureuse qui jaillit sur la toile et qui finit par se dessécher malgré toutes les fleurs de l'amour que Margrit Wirth lance désespérément en gerbes en direction de son entourage pour sublimer sa révolte contre cette société de consommation qui ne voit rien, ces gens qui ne voient rien, qui ne respectent rien, bouffent et s'éclatent sans jamais s'arrêter sur l'essentiel de l'existence, ont des jugements hâtifs, abruptes et définitifs sur les marginaux, les gens qui semblent ne pas faire face au conditionnement de nos existences, cette "normalité" exigée pour être accepté-e dans le jeu carnavalesque de la société .
A la fin, l'amour triomphe dans le regard de Margrit Wirth. Mais à quel prix? A quel sacrifice personnel? A quelle solitude elle se confronte pour aller chercher au fond d'elle ses élans de romantisme désespérés?
Etais-je mi-ange, mi-diable,
mi-fidèle, mi-infidèle,
à notre union?
J'étais pourtant entièrement à toi
de toutes les façons.
Sans titre
Te souvenais-tu
de nos corps enlacés
quand tu aimais ailleurs?
Je ne t'ai jamais oubliée
même quand tu partais
t'abandonner vers d'autres bras
qui demandaient ton corps.
Sans titre, non signé
Mes grandes colères
étaient alors des bouquets de fleurs
que je lançais à ton visage
pour que tu te rappelles
combien je t'aimais.
Sans titre
L'amour.
Ce feu indomptable.
Cette folie inépuisable.
Je m'épuisais à force d'écorcher
notre amour à cause de tes infidélités.
Je t'aimais pourtant libre et follement amoureuse
égarée dans tes rêveries sauvages d'Alexandrie.
Sans titre
Minuit moins une.
Cendrillon n'était-elle qu'une souillon
vue par la lorgnette rikiki
de la société de consommation?
Qu'une Marie couche-toi là
sans valeur autre que d'offrir de vilains plaisirs
aux amateurs de chair fraîche?
L'amour n'est jamais ce que l'on croit
mais unique à notre regard.
Il est dans ce regard porté vers l'autre
plus qu'une illusion fugitive.
L'art d'aimer est une musique sublime.
Il faut y croire malgré les trahisons supposées
et vivre heureux-se auprès de son arbre.
Sans titre
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